Garant de la pérennité du patrimoine culturel, la restauration renforce le caractère identitaire de la ville et redonne à un site sa qualité et son essence d’origine.

Le patrimoine reflète les besoins contextuels d’autrefois, ceux-ci diffèrent des standards et des exigences contemporaines. Cet écart entre les époques est marqué par la dualité entre la conservation des biens collectifs et le développement économique.

À l’instar de l’architecture principalement composée de structures permanentes, quasi immuables, alliant matérialité et techniques, l’architecture de paysage est un héritage fragile, fait de matériaux vivants soumis à un processus naturel éphémère. En dépit du manque d’expérience, du savoir constitué quant à sa continuité, il est alors difficile d’intervenir.

Ainsi, cette recherche prend comme point de départ la nécessité de réfléchir sur les enjeux des places publiques modernes. L’étude porte un regard sur quelques projets réalisés par de grandes figures de l’architecture de paysage de la période moderne telles que Cornelia Oberlander, Burle Marx et Lawrence Halprin. À la lumière de cet examen, il en résulte une compréhension du processus de restauration de leurs aménagements, de leur contexte d’implantation et des différents organes qui contribuent à leur  mise en valeur.

À travers les espaces publics comme Skyline Park de Lawrence Halprin, le Jardin du Casino de Burle Marx et le terrain de jeux du Pavillon du Canada, à Expo 67, de Cornelia Orbenlander, pour ne citer que ceux-ci, il a été possible de discerner la stratégie déployée en vue d’assurer leur pérennité.

Les résultats de cette recherche permettent d’avancer que même si le discours sur le patrimoine mise sur des actions durables, les questions liées à la conservation et l’intégration des sites modernes dans le paysage urbain contemporain reste irrésolues. L’état de certains projets démontre qu’il importe d’intervenir en ayant conscience de la valeur de l’objet en danger.

Les organismes tels que UNESCO, ICOMOS , Heritage  Vancouver, Héritage Montréal, Cultural Landscape Foundation et bien d’autres s’engagent dans le combat contre la démolition de ces œuvres, mais le bilan reste parfois catastrophique.

À Rio de Janeiro, des 28 projets de Burle Marx, une dizaine sont abandonnés; rares sont ceux qui sont remis en état. Certains,  notamment réalisés en collaboration avec Oscar Niemeyer, profitent de l’implication de la fondation de l’architecte pour survivre. Il est toutefois vrai que Docomomo Brésil et the Garden History Society s’appliquent à la sauvegarde des aménagements de Burle Marx. À Brasilia, un décret de loi impose depuis 2011 la protection de ses parcs. Pourtant des 9 jardins de l’architecte paysagiste, 4 sont abandonnés sans compter que la plupart ne ressemblent plus au plan d’origine.

Aux États-Unis, la fondation Lawrence Halprin veille à la préservation de ses projets. Plusieurs de ses parcs font d’ailleurs partie du Registre National des Places Historiques. Quelques sites sont toutefois détruits parce qu’ils ne répondent plus aux besoins des usagers ou ne s’intègrent plus au nouveau contexte.

Outre Robson Square, à risque en 2008, les œuvres de Cornelia Oberlander ne sont pas en danger. Cela dit, Heritage Vancouver est un organisme qui participe activement à la conservation du patrimoine, dont ceux créés par Oberlander.

En somme, la restauration des espaces publics modernes est avant tout une question de valeur. La caractérisation par les valeurs permet notamment de comprendre l’espace  par ses qualités tant architecturale, historique, esthétique, artistique que sociale. Son intégration s’exprime à travers son expérience et son influence dans la mémoire collective. Il n’en demeure pas moins que la démolition des aménagements sous des prétextes économiques, sociaux et culturels devient monnaie courante.  Les différents acteurs clés sont alors indispensables dans le processus de conservation du patrimoine. Les sites qui  échappent à la destruction  bénéficient d’une bonne diffusion et sont pris en charge par des citoyens, des organismes ou des fondations d’architectes.

Pour que les enjeux sur la restauration des espaces publics modernes soient pris en compte, il faut que sa conservation quitte cet état latent de naufragé en péril où les multiples interventions consistent à éteindre des feux plutôt que de les prévenir.